FAUT-IL DIRE "À VOS SOUHAITS" OU "SANTÉ" QUAND ON ÉTERNUE?

Le printemps, c'est aussi synonyme d'allergies et... d'éternuements. Face à la recrudescence de ces expirations brusques et bruyantes, mieux vaut savoir comment réagir. Une question, essentielle, mérite d'être élucidée: faut-il manifester son intérêt pour ces irritations des muqueses nasales par un cordial «Santé!» ou «A vos souhaits!»? Voici quelques clés pour percer ce mystère.

«S’il arrive d’éternuer en présence de quelqu’un, […] il faut faire le signe de la croix, puis soulever son chapeau pour rendre la politesse aux personnes qui ont salué.» Et c'est Erasme qui le dit... en 1530. À en croire l'humaniste néerlandais, «c’est chose religieuse de saluer celui qui éternue». Au XVIe siècle, explique le quotidien de Genève, on pensait qu’à chaque éternuement, c’était un peu de l’âme qui s’envolait, et donc qu’on se rapprochait de la mort. D’où la formule «à tes souhaits»: parmi les plusieurs origines possibles de cette expression, la plus courante veut que les souhaits émis visent à conjurer le mauvais sort puisque l'âme pouvait être expulsée suite à un éternuement.

Mais les Lumières et le bon goût bourgeois sont passés par là. En 1703, Jean-Baptiste de La Salle, dans ses Règles de bienséance, rappelle que:

«Quand quelqu’un éternue, il ne faut pas dire tout haut: Dieu vous bénisse; on doit seulement, sans proférer aucune parole, se découvrir.»

En 1889, la baronne Staffe pousse la bienséance encore plus loin: il faut éternuer assez discrètement pour que personne ne s’en aperçoive et éviter ainsi qu’«une personne imbue des usages d’autrefois» ne réagisse par un souhait mal à propos.

Et aujourd’hui? Tous les manuels sont d’accord avec Jean-Baptiste La Salle et la baronne de Staffe:

«Il faut renoncer aux formules du genre à vos souhaits et autres.»

BREF: Vous pensez sans doute respecter les bonnes manières en disant "à vos souhaits" lorsque quelqu'un éternue, mais ce n'est pourtant pas le cas. C'est en effet une façon détournée de faire remarquer à la personne qu'elle nous a importuné en émettant ce bruit. Selon les règles de politesse, il faut rester sans réaction.